Une rentrée n’est jamais comme les autres.
Nous savions qu’en rentrant « à la maison », sur notre bateau à Bizerte, nous entamions une 3e saison particulière. Deux chantiers nous attendaient : vendre notre entreprise, Make it Marseille, d’une part, et préparer la transat’ de décembre d’autre part. Caboter l’esprit léger de mouillages en mouillages attendrait les Antilles !
Notre priorité était de finaliser rapidement le premier point.
Le schéma que nous avions mis en place à notre départ en voyage ne fonctionnait plus : nous avions laissé à la nouvelle directrice suffisamment de trésorerie pour tenir neuf mois, charge à elle de développer l’activité ensuite. Ça n’a pas été le cas. Un an après, au printemps dernier, nous ouvrions les possibles avec elle, quitte à céder nos parts. Une opportunité se dessine à l’été : un couple d’entrepreneurs se montrent intéressés par la reprise avec notre directrice et d’autres associés. Ils souhaiteraient faire de Make it leurs bureaux et ateliers, tout en continuant d’y accueillir les membres qui y viennent travailler chaque jour. Nous nous tapons dans la main avant notre départ en septembre, quitte à « brader » ce que nous avons mis dix ans à construire : la priorité est de trouver une suite qui permette que l’histoire continue et de sortir par le haut de cette belle aventure entreprenariale. Il est temps de tourner la page.
Nous connaissons bien les repreneurs : lui a été l’un des menuisiers qui avait construit le mobilier de Make it à son ouverture, nous n’avons cessé de collaborer ensuite. Ce qui fait que cette cession a d’autant plus sens pour nous.
Nous nous disons souvent que nous avons la chance d’être très bien entourés : cette fois cela se concrétise avec la main tendue par l’un des membres de notre Comité Stratégique, avocat d’affaire, qui nous propose de nous accompagner gracieusement pour ce deal, avec l’aide d’un de ses collaborateurs.
Mais - faut-il qu’il y ait toujours un mais ? – ça se gâte...
Il faut faire vite, Make it ne tiendra pas encore beaucoup de temps. Le deal est maintenant entre les mains des avocats, et celui des acquéreurs s’avère particulièrement agressif quant aux closes proposées. La moindre ligne du contrat est discutée, jeu d’avocats normal d’après nos conseils. Mais nous percevons les conditions demandées comme démesurées et presque chaque proposition d’assouplissement est refusée. Nous ne comprenons pas ce que cherchent les acquéreurs, avec qui la communication est devenue quasi nulle.
Nous avons toujours entrepris avec l’humain au cœur, nous nous retrouvons désorientés.
Faire avancer ce dossier à distance, depuis notre bateau, avec deux enfants h24/24 s’avère être une période éprouvante pour nous.
Nous sommes à bout et avons besoin de relais.
Depuis la venue à bord de notre petit cousin avant l’été, nous voulions renouveler l’expérience d’accueillir un troisième adulte qui puisse partager notre quotidien et assurer des quarts lors de toutes les traversées qui nous attendent.
Emma contacte Marie via un forum en ligne d’équipiers. Nous lui dressons le tableau : nous sommes une famille de quatre vivant à bord depuis un an et demi, avec deux garçons bien énergiques à qui nous faisons l’école ; nous vivons une période professionnelle bien stressante et notre priorité est de finir la vente de notre entreprise avant de repartir de Valencia direction Gibraltar. Ensuite ce sera les Canaries puis le Cap Vert avant la grande traversée que nous avons déjà prévue de franchir avec deux amis. Alors, prête à embarquer ? « A fond » nous répond-elle. Banco. Nous nous retrouvons à la Marina de Valencia où nous sommes posés pour préparer le bateau en vue de la transat’ et finaliser la vente de Make it.
Marie, 25 ans, ainée d’une fratrie de trois filles, est d’emblée adoptée par la famille. « Notre grande sœur » comme disent les enfants trouve rapidement sa place dans notre aventure. Pile, son âme d’enfant ravie les notre autour de jeux et autres occupations ; face, Marie nous aide efficacement dans le quotidien de la Vie à bord. Elle restera avec nous plus d’un mois, jusqu’au Cap Vert ! Forts du visionnage du célèbre flim de Walt Disney, les garçons la baptisent rapidement « Mary Poppins ».
Marie devenue Mary nous libère du temps pour cette dernière semaine de négociations.
Bon an, mal an, nous réussissons à rétablir le contact avec une partie des acquéreurs pour arrondir les clauses qui nous paraissent inacceptables. Le deal est signé fin octobre. Nous en sortons déçu humainement mais heureux d’avoir réussi à écrire cette suite pour cette belle entreprise que nous avions créée avec notre cœur.
On a parfois (tous) besoin de l’apparition d’une Mary Poppins dans les moments forts que nous réservent la Vie.
É-nième call avec nos avocats depuis le café de la Marina de Bizerte
On y croit ! La dernière ligne droite de négocation est en cours. Les enfants sont forcemment partie prenantes...
C'est signé ! Champagne en compagnie de Mary qui nous a rejoints à Valencia.
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